Commémorer les personnes qui ont perdu la vie sur le chemin de la sécurité

Les tragédies dans la région méditerranéenne se poursuivent malheureusement à une échelle significative: 3 111 personnes ont perdu la vie en 2017 et, au 12 juin, 792 décès ont déjà été comptabilisés en 2018 (Source: site internet de l’OIM “Missing migrants”). Au cours des trois dernières années seulement, plus de 10 000 personnes ont perdu la vie. Depuis 2000, plus de 30 000 personnes auraient perdu la vie en se rendant en Europe, se noyant en mer ou dans les rivières, étouffant dans des conteneurs sur des camions ou des bateaux. En raison du plus grand nombre d’arrivées, l’attention politique en Europe est actuellement concentrée sur l’Italie. La situation aux frontières grecque et espagnole, cependant, nécessite également une attention. La situation aux frontières orientales de l’UE est encore moins connue. Les rapports d’autres régions du monde indiquent également des développements alarmants, par exemple dans la Corne de l’Afrique.

En réponse, les organisations non gouvernementales ont poursuivi leurs opérations de recherche et de sauvetage en Méditerranée – Proactiva Open Arms, SOS Méditerranée, Sea Watch, Jugend Rettet et d’autres organisations ont déployé des navires, des experts et des volontaires pour secourir les personnes en détresse. Les Églises en Europe ont soutenu ces opérations par divers moyens. Certains politiciens en Europe ont fortement attaqué ces opérations pour “fournir un service de ferry” vers l’Europe, pour aider les trafiquants ou même les accuser d’être des trafiquants. La Libye a unilatéralement étendu sa zone de recherche et de sauvetage et les garde-côtes libyens ont, à diverses occasions, harcelé des équipes de recherche et de sauvetage non gouvernementales, menaçant le personnel et sauvé des migrants.

Certaines organisations offrant des services de recherche et de sauvetage ont donc été contraintes d’arrêter leurs services essentiels. Les rapports sur les marchés d’esclaves en Libye soulignent le souci croissant pour la vie de ceux qui se rendaient en Europe, même avant leur départ, ou après leur retour en Libye.

Les événements et les déclarations de la semaine dernière autour du navire de recherche et de sauvetage “Aquarius” montrent que certains décideurs politiques donnent la priorité à leurs chances électorales sur la vie et le bien-être des personnes échouées en mer. Ils préfèrent transférer la responsabilité de la protection aux autres.

Les Eglises en Europe ont réagi aux pertes de vie en Méditerranée en offrant une solidarité pratique, en soutenant les opérations de recherche et de sauvetage, mais aussi en plaidant pour des moyens sûrs et réguliers pour les réfugiés et les migrants d’entrer en Europe. À cet effet, le CCME et ses partenaires ont lancé le projet “Safe Passage”. Des membres du CCME et de la CEC en Belgique, en France et en Italie, en coopération œcuménique avec des partenaires catholiques romains, ont entrepris des projets de parrainage d’arrivées de réfugiés viables grâce à des visas de réinstallation et des visas humanitaires.

L’Assemblée générale de Novi Sad de la Conférence des Eglises européennes réunie en début d’année a réaffirmé la position de la CEC : « Se dresser contre le modèle de fermeture des frontières qui fait de la traversée de la Méditerranée l’une des voies migratoires les plus dangereuses du monde (plus de 5 000 personnes perdu la vie en 2016); nous continuerons de commémorer cette perte de vie. » (Énoncé des enjeux publics Assemblée générale de la CCE, 2018)

De nombreuses Églises à travers l’Europe ont répondu à cet appel et organisé des cérémonies de commémoration autour du 20 juin, Journée internationale des réfugiés. Cette année, nous souhaitons recommander la tenue de services de commémoration le dimanche après le 24 juin. Dans certains pays, d’autres dates tout au long de l’année peuvent être appropriées.

En proposant une réflexion plus large sur l’hospitalité et la migration, l’Assemblée générale de la CCE de 2018 a exprimé : « La protection des droits des personnes qui ont abandonné leur foyer à cause de la guerre et qui sont conduites en Europe dans l’espoir d’une vie meilleure obligent l’Europe à se regarder et à réfléchir à son avenir, mais aussi à sa responsabilité et sa place dans le monde. La théologie de l’hospitalité holistique est basée sur la juxtaposition des gens de Chios, en ce qu’ils voient le réfugié comme une icône pleine et complète du Christ. C’est à travers l’objectif de la Parole de Dieu que l’existence humaine est vraiment valorisée collectivement et individuellement. C’est un fait que le premier véritable étranger n’est autre que le Christ lui-même. » (Déclaration publique)

Laissez-nous, dans cet esprit, nous souvenir conjointement des personnes avec et sans papiers qui sont mortes aux frontières européennes, partageons notre chagrin dans la prière.

Fr. Heikki Huttunen, Secrétaire général – Conférence des Eglises européennes

Doris Peschke, Secrétaire général – Commission des Eglises pour les Migrants en Europe

PDF à télécharger (en anglais) proposant des informations, sujets d’intercession et des idées d’actions :

GENSEC-2018-152 Commemorating lives lost_App