Comment fonctionne votre Centre, entre l’école de langue et le foyer, depuis que nous sommes en confinement ?
Le centre des Cèdres (www.lescedres.com) accompagne depuis 1973 de futurs missionnaires en territoire francophone dans leur apprentissage du français. Dès les annonces du 12 mars, notre directeur Marc Derœux a pris la décision de fermer l’école sans toutefois priver les étudiants de leurs études. L’arrêt brutal en plein milieu de leur progression aurait évidemment été fort dommageable. Nos équipes pédagogique, administrative et d’entretien se sont réunies en urgence pour proposer les cours à distance, ce que nous faisons depuis lors.
Au sein du foyer, les consignes sanitaires avaient déjà été communiquées régulièrement depuis fin février. En l’absence de notre agent d’entretien, notre équipe sur place et les étudiants se sont organisés pour que chacun puisse participer à la préservation d’un environnement sain et propre. Chaque jour, les espaces communs, comme la cuisine et les sanitaires, sont nettoyés ; les poignées de porte et les rampes d’escalier sont également désinfectées quotidiennement ; des solutions hydro-alcooliques sont à disposition de tous dans les lieux de passage. Enfin, des consignes strictes ont été données afin de limiter le nombre de personnes dans chaque pièce commune, afin de garantir la distance sanitaire. Entre ceux qui sont extrêmement vigilants et ceux qui le sont moins, l’équilibre n’était d’abord pas garanti, mais la transparence et la communication bienveillante de tous ont permis de le trouver très rapidement.
Quels sont les éléments positifs que vous relevez ?
Étrangement, cette période si particulière est un temps d’encouragement.
Il nous encourage à renforcer nos liens d’amitié fraternelle, déjà forts grâce au précieux travail d’aumônerie de Philippe et Rosemary Halliday, notamment auprès des familles qui se retrouvent isolées et souvent très fatiguées par la gestion intense et inhabituelle qu’impose le confinement.
Le confinement au sein du foyer encourage l’engagement, les prises d’initiatives et la responsabilité de certains résidents-étudiants qui prennent en main l’organisation de temps de convivialité et de spiritualité. Un planning hebdomadaire est ainsi organisé, proposant soirées film, jeux, études bibliques, temps de prière et de culte.
L’isolement et l’impossibilité de voyager, de rentrer dans son pays ou de commencer sa mission dans un autre pays, encourage plusieurs de nos étudiants à prendre le temps de réfléchir avec profondeur leur avenir, personnel et spirituel. Ce travail est essentiel pour ces futurs missionnaires pour lesquels l’aventure intense vient à peine de commencer. Souvent pris dans le tourbillon de leurs formations aussi diverses que fondamentales, il n’est pas toujours évident de prendre un temps pour soi et avec Dieu.
Enfin, de beaux évènements ayant eu lieu et un autre étant encore à venir, les congés maternité de collaboratrices aux Cèdres sont nombreux cette année. Il y eut donc beaucoup de changements au sein de l’équipe depuis la rentrée de janvier. Ce temps exceptionnel permet assurément d’approfondir les liens des membres du personnel, de révéler leurs talents et d’élargir leurs compétences.
Quelles sont les principales difficultés rencontrées ?
Le défi était particulièrement grand : l’approche Silent Way que nous proposons est très efficace notamment grâce aux interactions entre les étudiants d’une même classe, ce qui n’est quasiment plus possible à distance. Nous avons d’abord insisté sur l’aspect pédagogique et ainsi accompagné au mieux nos professeures, pour lesquelles la demande d’adaptation en urgence était énorme. Grâce à des réunions pédagogiques quotidiennes, nous avons rapidement pu mettre en place des cours en ligne, en constante amélioration. Nous ne serons jamais suffisamment reconnaissants envers nos trois professeures et nos étudiants, bienveillants et compréhensifs, qui nous furent souvent encourageants et de bons conseils. Nous avons aujourd’hui réussi à trouver l’outil qui nous est le plus stable et le mieux adapté, ainsi que les outils pédagogiques adéquats à cette nouvelle façon d’enseigner.
L’apprentissage reste néanmoins difficile dans ces conditions, surtout pour les étudiants qui sont parents et qui doivent s’occuper de leurs enfants – parfois nombreux – en même temps que leur propre scolarité. Certains ont du faire le choix d’abandonner leur apprentissage du français ; la difficulté de gérer de front leur apprentissage intensif et leur famille devenant trop grande.
Avec la situation économique que subissent tous les pays du monde, particulièrement ceux des Amériques où le système social n’est pas aussi protecteur que le nôtre, d’autres étudiants ont perdu beaucoup de leurs soutiens. Malgré nos discussions et propositions, ils ont préféré arrêter aussi leur scolarité, espérant pouvoir reprendre plus tard lorsque leur situation financière sera meilleure.
Nous avons aussi dû reporter, voire annuler, la venue de plusieurs étudiants, confinés dans leur pays ou ne pouvant se permettre les coûts de transport, devenus astronomiques, pour venir en France – lorsque les déplacements étaient encore possibles.
Plusieurs sessions de l’École pastorale, programmées en mars et avril, ont dû être annulées. Et nous ne sommes toujours pas assurés de maintenir encore celle du mois de juin….
Si nous avons su relever du mieux possible les défis pédagogiques et sanitaires, celui des finances est sans doute celui qui nous est, et sera, le plus incertain. D’autant que le projet important de reconstruction risque de prendre à nouveau du retard par le fait qu’aucune entreprise ne peut actuellement visiter le centre en vue d’établir des devis. Si vous souhaitez nous aider, vous pouvez utiliser notre plateforme Helloasso en CLIQUANT ICI (onglet “Les Cèdres”).
Envisagez-vous déjà l’après confinement ? Et si oui… comment ?
Évidemment, nous espérons rouvrir l’école dès que possible, l’apprentissage intensif d’une langue ne pouvant être pleinement efficace qu’en présentiel. Nous avons également tous hâte de pouvoir partager de nouveau les moments de convivialités, si chers et importants pour la plupart de ces jeunes et de ces familles qui se retrouvent en pays étranger, très loin de leur zone de confort familial et culturel. Les temps réguliers de culte sont aussi des moments forts pour les étudiants et les équipes.
Toutefois, afin de garantir un environnement sain, un emploi du temps adapté et un aménagement spécifique des salles de cours seront mis en place afin de limiter au maximum les regroupements et les contacts physiques, avec par exemple des pauses échelonnées.
La solution des cours en ligne, maintenant maîtrisée, peut éventuellement devenir une piste de réflexion intéressante dans l’élargissement de l’offre que nous proposons, par exemple pour des temps de conversation, d’aide personnalisée ou de pré-scolarité. Il est certain que seul un retour à la normale nous permettra de continuer à envisager les améliorations de notre centre, réflexions qui étaient déjà amorcées depuis quelques temps – les prochains travaux d’envergure en sont un exemple très concret.
Un dernier mot à laisser à nos lecteurs dans cette période si particulière ?
En ces périodes où l’individualisme laisse place chez beaucoup, et nous prions le maximum, à la solidarité nationale comme internationale, l’invitation de l’apôtre Paul à s’encourager mutuellement prend tout son sens (cf. 1 Thessaloniciens 5.11). S’encourager, c’est se donner l’un l’autre du courage, courage que l’on puise dans une relation toujours renouvelée avec Celui qui a vaincu la mort même !