Comment fonctionne votre Église depuis que nous sommes en confinement ?

Le matin du 13 mars, je consultais les membres du Conseil de notre église pour savoir si nous devions ou pas suspendre nos rassemblements. Les choses se sont enchaînées quand en fin de matinée nous avons reçu la circulaire émanant du bureau de notre Fédération et ensuite l’annonce du Premier Ministre interdisant les rassemblements de plus de 100 personnes. Il a fallu très vite s’organiser pour que la vie de l’église même ralentie, se poursuive et que la communion fraternelle ne souffre pas trop malgré le confinement et l’éloignement. Aussi, des outils dont nous disposions déjà mais qui n’étaient pas pleinement exploités ont vu leur utilisation bondir. C’est le cas par exemple du groupe WhatsApp de l’église qui était jusque-là utilisé pour communiquer des informations sur la vie de l’église et rappeler les événements de notre agenda. Aujourd’hui, c’est devenu un outil indispensable où quotidiennement je m’adresse aux frères et sœurs.

Nous avons créé une chaîne YouTube qui est devenue notre lieu de rassemblement pour célébrer Dieu et vivre ensemble le culte. Tout au long de la semaine pascale qui célébrait la Passion du Christ, j’ai proposé un rdv quotidien sur cette plateforme pour cheminer chaque jour avec Jésus jusqu’au dimanche de Pâques. C’est ainsi que les vidéos proposées sur la chaîne YouTube sont venues alimentées la page Facebook de l’église qui jusque-là était sous exploitée.

Les cellules de maisons, les groupes de prières, les études bibliques ont continué à fonctionner mais en visioconférence. Même la famille en Guadeloupe se connecte et se joint à nos réunions de prière et aux études bibliques. Le groupe des femmes organisent également des visioconférences pour prier ou simplement discuter autour d’un apéro virtuel.

Nous répétons souvent que l’essentiel de l’éducation de la foi se fait à la maison. Les parents sont les médiateurs de l’enseignement de la Parole de Dieu auprès de leurs enfants. Mais le rôle de l’église est loin d’être négligeable. Et c’est vrai que confinement oblige, l’église n’assure plus comme il faut son ministère d’éveil à la foi chez les plus jeunes. Les leaders de jeunesse leur proposent des rendez-vous en visioconférence. A titre d’exemple, ils leur ont recommandé de visionner un film, puis le lendemain ils en ont discuté par écrans interposés. Pour les tout-petits, sur la chaîne YouTube, nous leur proposons de temps en temps une petite capsule sur une histoire biblique. Ces montages d’une durée de 2mn en moyenne sont réalisés par des amis de l’église avec leurs enfants. Plusieurs également participent à la préparation du culte dominical : salutations de plusieurs familles de l’église, lecture, chants, musique… Après il n’y a plus qu’à réaliser le montage…

Mais nous pensons également à ceux qui ne sont pas équipés ou qui n’ont pas l’expertise pour utiliser ces moyens modernes de communication. Il s’agit particulièrement de nos aînés, à qui nous proposons un rendez-vous téléphonique quotidien. Nous chantons, nous prions avec eux au téléphone… Bref, comme je le dis souvent, tout est à nous. La seule différence, c’est que nous le réalisons un peu plus en cette période.

Quels sont les éléments positifs que vous relevez ?

La parole populaire dit « Loin des yeux, loin du cœur », pourtant c’est tout l’inverse que nous vivons. Jung également disait, « Les plus belles vérités du monde ne servent à rien tant que leur teneur n’est pas devenue pour chacun une expérience interne originale. » Je crois que plus jamais, l’église incarne et accompli en cette période des vérités bibliques.

Partout sur les réseaux sociaux, à la télé, des astuces sont partagées et des conseils sont prodigués pour mieux vivre le confinement imposé par les autorités en cette période d’épidémie. Certains ne manquent pas d’imagination et d’humour. Ces circonstances particulières amènent aussi les croyants que nous sommes à réfléchir sur notre piété : le culte en famille retrouve des adeptes, la culture d’une vie de prière est encouragée… Oui, de grands bienfaits spirituels peuvent naître du confinement. Rappelons-nous les paroles du Seigneur : « Lorsque tu veux prier, entre dans ta chambre, à l’écart, ferme la porte pour prier ton Père qui est là, dans cet endroit secret ; et ton Père qui voit ce que tu fais en secret, te récompensera. » (Matthieu 6. 6). Pensons également aux disciples à qui Jésus avait demandé de rester « confinés » jusqu’à qu’ils soient revêtus de la puissance du Saint-Esprit : « … mais vous restez dans la ville jusqu’à ce que vous soyez revêtus de la puissance d’en haut. » (Luc 24. 49). Citons encore Moïse en confinement avec Dieu pendant quarante jours sur le mont Sinaï. Lorsqu’il revint de son face-à-face avec Dieu «…son visage rayonnait parce qu’il avait parlé avec Dieu. » (Exode 34. 29).

Quelles sont les principales difficultés rencontrées ?

Malheureusement, nous connaissons tous des personnes qui ont été infectées. Notre église n’a pas été épargnée. Certaines familles se sont trouvées endeuillées. Et c’est tout le processus de deuil qui est rendu difficile et les rites funéraires sont bouleversés. Et évidemment même si nous sommes très reconnaissants pour toutes ces ressources qui sont à notre disposition, rien ne vaut le rassemblement physique des croyants. Et il nous tarde de pouvoir nous réunir à nouveau. Nous appelons de nos vœux et de nos prières ce jour. « Ce sera le culte de la résurrection », me disait une jeune sœur.

Envisagez-vous déjà l’après confinement ? et si oui… comment ? 

Oui, nous nous y pensons. Nous espérons de tout cœur ne rien perdre de toutes les choses positives que nous aurons apprises, que nous saurons les rendre pérennes. L’église doit sortir grandie, plus unie. Quant à l’utilisation des outils modernes de communication, nous voulons étendre leur utilisation, exploiter encore leurs possibilités. Car il est clair qu’ils nous permettent d’atteindre un public que nous ne pourrions pas toucher autrement… Je le redis, « Tout est à nous », alors montrons encore créatifs et inventifs pour poursuivre la mission de l’église avec un cœur et un zèle renouvelés.

Un dernier mot à laisser à nos lecteurs dans cette période si particulière ?

Je ne vais pas chercher bien loin, mais simplement partager avec vous, la pensée que j’ai soumettais la réflexion des frères et sœurs ce matin.

Nous avons tous vu et entendu le témoignage de plusieurs personnes touchées par une forme sévère du Covid-19, qui ont été en réanimation et qui ont été guéries après avoir frôlé la mort. Toutes ses personnes ont encore une chose en commun : Toutes elles disent que leur regard sur la vie change, qu’elles apprécient encore mieux les joies simples, les petits plaisirs. Sur leur échelle de valeur, l’essentiel se redéfinit.

Qu’elles soient croyantes ou pas, toutes ces personnes doivent être pour un peu comme des prophètes. Ce que je veux dire, c’est que nous ne sommes pas obligés d’attendre d’être dans un état limite pour réfléchir à nos voies. Nous qui sommes là et qui ne sommes pas dans la situation de mourants sur lit, ne pourrions-nous diriger notre méditation sur cette pensée. Quelles sont les choses que nous n’avons pas faites et que nous voudrions faire ? Quelles sont celles que nous aurions aimé faire autrement ou mieux ? Il ne s’agit pas de nous étendre sur nos défauts passés ou présents. Il s’agit plutôt de nous interroger sur ce qui nous motive dans la vie ?

Voilà un exemple de programme qui pourrait organiser notre vie ou même simplement notre journée.

« Car tu es grand, tu fais des merveilles, tu es le seul Dieu. Seigneur, montre-moi quel chemin je dois suivre, je veux vivre en te restant fidèle ; mets en moi cette seule préoccupation : rester soumis à ton autorité. Seigneur mon Dieu, je te louerai de tout mon cœur, je t’apporterai mon hommage pour toujours. » Psaume 86. 10-12